10 août 2024

Les intérêts de la holding

La holding est un outil crucial pour la reprise d’entreprise, la gestion de trésorerie et la transmission familiale. Mais quels sont ses atouts sur les plans financier, juridique, fiscal et patrimonial ?

La holding est une société qui possède des participations dans d’autres entreprises. Elle peut être soumise soit à l’impôt sur le revenu (IR) soit à l’impôt sur les sociétés (IS), sans correspondre à une forme juridique spécifique. En matière fiscale, il est important de distinguer entre une holding « passive » et une holding « animatrice ». Cette dernière, grâce à son rôle actif, bénéficie d’avantages fiscaux significatifs comme le pacte Dutreil, l’exonération de l’IFI pour les biens professionnels, des réductions d’impôts pour l’investissement dans des PME, et des abattements spécifiques, notamment un abattement fixe de 500 000 euros en cas de départ à la retraite.

Pour qu’une holding soit qualifiée d’animatrice, elle doit non seulement gérer ses participations mais aussi participer activement à la gestion de son groupe et fournir des services spécifiques à ses filiales, comme des services administratifs, juridiques, comptables, financiers et immobiliers. Les formes juridiques les plus courantes pour une holding sont les SAS, SARL et sociétés civiles, surtout lorsqu’elle rend des prestations de services. Les structures comme SA, SNC ou SCS sont rarement utilisées.

La holding est souvent privilégiée pour la reprise d’entreprise, la gestion de trésorerie et la transmission familiale en raison de ses nombreux avantages financiers, juridiques, fiscaux et patrimoniaux. Pour bien comprendre pourquoi cette structure est si souvent utilisée, il est essentiel de considérer ces différents aspects dans leur ensemble.

Les leviers financiers et fiscaux de la holding 

Généralement, un chef d’entreprise commence par créer une société opérationnelle pour exercer son activité principale. Au fur et à mesure que les objectifs de croissance, de cession ou de transmission se précisent, il est courant qu’il envisage la mise en place d’une société holding. Cette démarche peut initialement être motivée par des besoins professionnels avant de se tourner vers des considérations patrimoniales.

La constitution d’une holding peut se faire soit par le bas, soit par le haut.

La méthode par le bas implique un apport de la holding à une filiale, ce qui peut compliquer l’opération, surtout en cas d’apports en nature tels que des actifs partiels, des scissions ou la filialisation d’activités. Cette forme d’apport peut également être monétaire.

La méthode par le haut, la plus répandue, implique un apport de la holding à une filiale, ce qui peut également compliquer l’opération, notamment en cas d’apports en nature ou monétaires. Elle se résume principalement à une cession, un apport pur et simple ou à titre onéreux des titres de la société existante à la holding. Cette approche est souvent associée à des opérations de Leverage Buy Out (LBO) ou de refinancement. L’effet de levier financier est alors accentué lorsque la holding acquiert la société par emprunt, remboursé par les distributions de la filiale.

La capacité d’emprunt de la holding dépend de la rentabilité de la société cible et de sa capacité à générer des dividendes pour rembourser la dette. Pour cela, la filiale doit être rentable et peu endettée. L’utilisation d’une holding permet d’accroître la capacité d’emprunt et de rembourser la dette grâce aux dividendes, avec des avantages fiscaux.

A titre d’illustration

Prenons un exemple concret pour illustrer les leviers financiers et fiscaux. Madame T, présidente de la société SAS X, spécialisée dans la location de véhicules industriels et de nettoyage, détient 52 % des parts, tandis que son frère, Monsieur Z, détient les 48 % restants. La société, créée en 2005 avec un capital initial en numéraire, est valorisée à 15 millions d’euros aujourd’hui et n’a plus de dettes.

Actuellement, Madame T et Monsieur Z ne visent plus la croissance, mais la sécurisation de leur activité. Cependant, ils ne veulent pas vendre la société à un tiers. La SAS X dispose d’une trésorerie excédentaire d’environ 8 millions d’euros.

Leurs objectifs prioritaires sont les suivants :

– Rééquilibrer leur patrimoine professionnel et personnel, car ils disposent de peu de liquidités personnelles. Ils souhaitent récupérer environ 70 % de la valeur actuelle de la société.

– Réorganiser la détention des parts entre les membres de la famille.

– Préparer la transmission future en permettant à d’autres personnes de rejoindre le capital de l’entreprise.

Première étape : 

Deux holdings vont être constituées par apport en nature des titres de la SAS X, avec Madame Z apportant 2 340 000 euros et Monsieur Z apportant 2 160 000 euros. À ce stade, chaque holding détiendra 100 % du capital. Leur participation respective dans le capital de la SAS X sera de 15,6 % et 14,4 %.

Sur le plan fiscal, la plus-value d’apport sera reportée d’imposition conformément à l’article 150 0 B ter du CGI. Cette opération permet de différer l’imposition de la plus-value constatée lors de l’apport jusqu’à la vente ultérieure de la holding elle-même.

En pratique, la cession de la holding est peu courante, car la cession des titres de la SAS X se fera plutôt « par le bas », c’est-à-dire que la holding cédera les titres de la SAS X dans cet exemple. Ainsi, la cession des titres de participation par la holding pourra bénéficier du régime fiscal favorable des titres de participation.

Deuxième étape : 

Tout d’abord, les holdings vont contracter un emprunt de 10 500 000 euros pour racheter les participations non apportées, soit 5 460 000 euros pour Madame et 5 040 000 euros pour Monsieur.

Les dividendes de la SAS X seront ainsi utilisés pour rembourser la dette de chaque holding, avec des avantages fiscaux grâce au régime mère-fille.

Les intérêts d’emprunt sont déductibles dans la holding, mais limités dans le cas d’une vente à soi-même.

Madame T percevra environ 3 960 000 euros nets sur une participation de 5 460 000 euros, et Monsieur Z recevra environ 3 660 000 euros sur une participation de 5 040 000 euros.

La cession à soi-même profitera du régime fiscal des PME de moins de dix ans, permettant de récupérer rapidement des années potentielles de distribution de dividendes.

Enfin, la remontée de trésorerie dans chaque holding sera soumise à un faible frottement fiscal de 1,25 %, contre 34 % en cas de distribution directe. Ainsi, chaque holding disposera de 98,75 % du montant de la distribution, contre 66 % en l’absence de holding interposée.

La holding comme véritable levier patrimonial

Dans cet exemple, l’objectif principal de l’opération est de liquider une partie du patrimoine professionnel. Le mécanisme d’apport-cession est souvent choisi lorsque le chef d’entreprise envisage de se réorienter vers une nouvelle activité. Au lieu de payer l’impôt et de réinvestir le montant net, il peut réinvestir l’intégralité du produit de vente des titres qu’il apporte à la holding.

Gestion de la trésorerie

Après la création de la holding et la finalisation des procédures, la question de la gestion des fonds dans le groupe devient essentielle. Il faut déterminer combien d’argent est nécessaire pour l’exploitation et ce qui est en surplus, appelé trésorerie stable.

Les dirigeants décideront d’investir cette trésorerie stable dans la holding ou à des fins personnelles, souvent en fonction des aspects fiscaux. Même si le coût de la distribution a baissé avec l’introduction de la Flat Tax à 30 % depuis janvier 2018, les dirigeants sont toujours hésitants à retirer des fonds.

Auparavant, avant janvier 2018, la distribution de dividendes était soumise à l’impôt sur le revenu, augmentant ainsi l’assiette taxable à l’ISF.

La problématique de la sortie de trésorerie exonérée d’ISF tant qu’elle reste dans la holding, en tant que fonds nécessaires à l’activité, n’est plus pertinente avec l’IFI. Investir les fonds disponibles dans la société permet d’éviter l’impôt sur la distribution et de placer des montants plus conséquents, qui seront valorisés au sein de la société. À ce stade, le potentiel patrimonial de la holding prend tout son sens, grâce à l’utilisation et à la transmission des fonds. Elle peut devenir un véritable outil d’investissement familial.

Les choix d’investissement

Différents types d’actifs peuvent être investies grâce à la trésorerie, comme des produits financiers ou immobiliers. Le recours à l’endettement peut également être envisagé pour ne pas immobiliser de trésorerie sur le moyen terme, par exemple.

Avant de réaliser des investissements, il est important de définir la durée pendant laquelle les fonds seront placés. Certains produits financiers sont à court terme (six mois, un an), à moyen terme (trois ans) ou à long terme (plus de cinq ans). Certains sont bloqués jusqu’à leur échéance contractuelle, tandis que d’autres peuvent être retirés à tout moment. Ensuite, il faut considérer le rendement attendu et le niveau de risque associé.

Les entreprises ont la possibilité d’investir leur trésorerie dans un compte-titres, qui offre accès à différents types de placements comme des actions, des obligations, des OPCVM ou des produits structurés. Ces choix peuvent répondre à des besoins spécifiques en termes de liquidité, de rendement ou de garantie du capital.

Pour les sociétés patrimoniales et les entités ne pratiquant pas d’activité commerciale, il existe des options plus diversifiées, comme le contrat de capitalisation. Celui-ci propose une variété de supports, dont le fonds euros garantissant le capital investi. En complément, il est possible d’investir dans des unités de compte offrant une diversification en fonction des horizons de gestion, des niveaux de liquidité et/ou du risque choisi.

Le maintien de la trésorerie excédentaire au sein de la holding, plutôt que de la distribuer, peut poser des problèmes en termes d’application du dispositif Dutreil. Ce dispositif permet une transmission d’entreprise avec un abattement fiscal de 75 % sur sa valeur, mais il est généralement réservé aux entreprises ayant une activité commerciale, industrielle, artisanale, agricole ou libérale.

La transmission de la holding 

Pour transformer la holding en une véritable entité familiale, il est crucial d’effectuer rapidement la transmission des parts. Cette transmission, réalisée peu de temps après la création, permet d’éviter la taxation des plus-values à long terme générées au sein de la holding. Elle peut se faire soit en pleine propriété, soit en démembrement.

Au niveau juridique, il est essentiel de choisir les options statutaires appropriées et de rédiger correctement les statuts pour organiser les pouvoirs de chacun. Il faut d’abord déterminer qui exercera le pouvoir, en tenant compte du caractère familial de l’entreprise, ce qui implique un contrôle sur les entrées et sorties des associés familiaux. La direction de la holding devrait être confiée à la personne à l’origine du projet.

Outre la désignation d’un gérant (pour une société civile) ou d’un président (pour une SAS), les statuts devront inclure des dispositions pour :

– Définir un objet social suffisamment large pour étendre les pouvoirs du dirigeant.

– Prévoir la succession en cas de décès du dirigeant sans nécessiter de réunion de l’assemblée générale des associés.

Il faudra également attribuer une majorité des droits de vote au dirigeant, soit en lui donnant une majorité de parts sociales, soit en créant des « parts de préférence ».

En cas de transmission en démembrement, le démembreur conserve l’usufruit. Pour éviter une diminution de ses pouvoirs, il est possible de renforcer ses prérogatives politiques, en lui accordant par exemple le droit de vote pour certaines décisions. Cela permet de renforcer son pouvoir de vote par rapport à la répartition légale du droit de vote entre les parties démembrées.

Le démembrement des parts sociales soulève des questions sur la répartition des droits financiers entre usufruitier et nu-propriétaire en ce qui concerne l’affectation des bénéfices. Pour éviter les conflits, les statuts ou une convention extra-statutaire peuvent régir les droits de chaque partie.

La souplesse statutaire offerte par la société civile et la SAS est un avantage considérable. La clé réside dans la prévention des conflits grâce à une rédaction statutaire adaptée.